Bien raconter une histoire est fondamental…
Depuis la nuit des temps les conteurs existent et nous font voyager dans leurs histoires. Mais comment font-ils pour capter l’attention des gens ? Quelles sont leurs techniques ?
Intéressons-nous uniquement à l’aspect logique de la chose…
L’importance de l’histoire dans un film :
Raconter une histoire c’est prendre le spectateur par la main,
et l’amener d’un point “A” à un point “B”.
C’est bien sûr les mêmes principes qui régissent l’écriture d’un livre :
Comment introduire le sujet, comment présenter les protagonistes, comment créer une intrigue, comment appeler un autre chapitre à la fin de celui que l’on vient de lire, etc.
Dans le domaine audiovisuel il y a des outils en plus : l’image, la musique, les bruitages, les voix, les acteurs, etc. Avec, évidemment, une syntaxe qui est propre au langage de l’image et du son.
Mais comment prendre le spectateur par la main ?
Qu’est-ce qui fait qu’un spectateur va accrocher dès le départ à l’histoire qui lui sera racontée ?
Imaginons deux personnes qui discutent entre elles.
Si l’une pose une question à l’autre, elle lui répond. On est d’accord ?
Imaginons maintenant cet interlocuteur comme un spectateur devant un film.
Si, par l’intermédiaire du film, le scénariste (ou le réalisateur) lui pose une question, en tant que spectateur, il ne peut pas répondre, puisqu’il ne peut pas interagir avec le film : on ne peut que regarder un film.
C’est le scénariste (ou le réalisateur) qui a la réponse.
C’est ainsi qu’après avoir posé LA question (l’intrigue), il va saupoudrer des éléments de réponse dans le cheminement de l’histoire. Le spectateur ne peut qu’attendre ces éléments qui vont l’aider à dévoiler la réponse. Littéralement, lever le voile…
Créer le paradoxe…
Comme dans une dissertation de philosophie, il faut créer un paradoxe. La résolution de ce dernier doit être le cheminement de l’histoire.
C’est à partir de cette question posée, pour laquelle le spectateur ne peut pas répondre par lui même, puisqu’il n’en a pas les éléments de réponse, qu’il va s’accrocher au déroulé de l’histoire. Car il attend la réponse à cette question.
Bien évidemment, il ne faut pas donner trop d’éléments pour que le spectateur n’ait pas la réponse avant la fin du film. Et suffisamment pour qu’il ait de quoi cogiter.
Dans l’idéal, la réponse c’est la chute de l’histoire, qui arrive à la fin du film. Telle une démonstration mathématique, qui une fois arrivée à la fin, amène un résultat fondé sur une logique implacable, de manière à ce qu’il n’y ait plus de doute possible dans la réponse. Tant que l’intrigue n’est pas élucidée, le spectateur reste accroché à l’histoire.
Il n’y a pas plus belle intrigue, quand on se demande à un moment donné de l’histoire : mais comment ce film va-t-il se finir ?
Les poupée russes…
Tout au long de ce saupoudrage des éléments de réponse, telles des poupées russes, d’autres questions peuvent découler de ces nouvelles données apportées au spectateur. Elles en sont des conséquences naturelles, qui vont, soit envoyer la réflexion sur une fausse piste, soit l’envoyer vers un autre paradoxe plus élevé que le premier.
D’ailleurs, si en plein milieu d’un film tous les indices pointent le doigt sur un coupable potentiel, alors vous pouvez être presque sûr que c’est une fausse piste. Ou, deuxième hypothèse, que le scénario est vraiment mauvais…
Quelques exemples d’intrigues :
Il était une fois dans l’Ouest (1968) :
Dans le film culte “Il était une fois dans l’Ouest”, la principale question est :
“Quel individu recherche l’homme à l’harmonica ?”
La réponse est amenée au fil de l’histoire par de courts plans dans lesquels cet individu arrive au ralenti, mais dont l’image est floue. Et c’est dans la scène du duel final que cette image devient nette. Le spectateur obtient ainsi la réponse à la question.
La série TV Columbo :
Dans la très ancienne série “Columbo”, la question posée au spectateur n’est pas :
“qui est le meurtrier”
mais
“comment le meurtrier va-t-il se faire attraper”…
Car cette série ne place pas le spectateur en tant qu’enquêteur, mais il se voit attribuer un point de vue beaucoup plus en hauteur : dans pratiquement un bon tiers de chaque épisode, le spectateur peut observer avec quels soins le meurtrier élabore sa stratégie puis sa tactique du meurtre. Il a tous les éléments pour voir de quelle façon le lieutenant Columbo va utiliser ces données pour piéger, légalement, le coupable.
Le spectateur a ici, un point de vue plus élevé, comme s’il assistait à un jeu d’échecs.
10 Cloverfield Lane (2016) :
C’est le même principe que pour le film “10 Cloverfield Lane” (Cf: fiche sur ce film), dans lequel le spectateur a les trois points de vue des trois protagonistes, sans avoir les données nécessaires pour déterminer lequel est dans la réalité.
La question posée ici au spectateur est :
“Qui dit la vérité ?”
Et en conséquence, car le suspens est particulièrement bien entretenu :
“Comment cette histoire va-t-elle se terminer ?”
Évidemment, mieux vaut que la réponse, c’est à dire la chute de l’histoire, arrive le plus tard possible dans le déroulé du film. Dans ce film là, c’est au moment du dernier plan que la réponse arrive, avec notamment, l’explication du titre du film…
Predator (1987) :
Dans un autre style, mais avec le point commun d’avoir un groupe de personnes dans une situation littéralement extra-ordinaire, l’intrigue du film “Predator” (1987) est :
“Quelle est cette créature ?”
Et bien sûr, la conséquence classique dans ce genre de film :
“Comment vont-ils s’en sortir ?”
Old (2021) :
Dans le même esprit, à savoir qu’un groupe de protagonistes se retrouve dans une situation inédite, le film “Old” pose la question suivante au spectateur :
Qu’est-ce qui fait vieillir les gens prématurément sur cette plage ?
Et par voie de conséquence :
Quelle en est la finalité ?
Le scénario est là aussi très bien ficelé, et l’on se demande, comment cette histoire va-t-elle se finir…
Le silence des agneaux (1991) :
Que dire de cette œuvre légendaire, qui en plus de créer une ambiance démoniaque, prend le spectateur par la main, mais en l’emmenant le long d’un chemin en pleine obscurité ?
Comme dans tout polar, la question est :
Quel est le criminel, et comment l’arrêter ?
Mais il y a un personnage aussi maléfique que le criminel, qui peut aider l’enquêtrice :
Comment l’aide-t-il ?
Car il s’agit là d’un jeu du chat et de la souris : l’enquêtrice doit décortiquer les éléments de réponse du psychopathe. Le spectateur est donc là, à la place de l’enquêtrice.
Le scénario étant du très haut vol, on se demande également, comment cette histoire va-t-elle se finir…
Dans cet extrait il faut remarquer le jeu d’Anthony Hopkins, qui à aucun moment, ne cligne des yeux, pour augmenter ainsi la part hypnotisante du personnage :
Côté série TV française :
Il y a, depuis peu, un renouveau scénaristique dans les séries TV françaises qui changent de l’éternel polar classique. Avec une teinte de fantastique.
Nous avons le très récent Prométhée : une série en six épisodes. L’histoire est très vite captivante, avec une belle intrigue. Malheureusement, beaucoup trop d’éléments de réponse à cette intrigue sont livrés un peu trop tôt, permettant ainsi d’y répondre dès la fin du quatrième épisode. C’est un peu tôt…
Cette autre série, Vortex, est tout aussi captivante, mais avec un tel scénario, que ce n’est que dans les dernières minutes du dernier épisode que la réponse à l’intrigue arrive. Et jusqu’au bout, on se demande “comment cela va-t-il bien se terminer”…
Conclusion :
Il y a donc toujours une question a poser au spectateur afin de capter son attention, et de le maintenir en haleine grâce à la démonstration de la réponse, qui en somme, est le fil conducteur du film. Et bien sûr, cette question doit être posée le plus tôt possible dans le film, afin “d’accrocher” au plus vite le spectateur : il n’y a rien de plus décevant qu’un film qui “tarde à démarrer”.
En ce qui concerne la fin de l’histoire, comme pour le bouquet final d’un feu d’artifice, la réponse à la question, c’est à dire la chute du film, doit être pratiquement le mot de la fin, et pour ainsi dire, clouer le spectateur sur place. La démonstration (le fil conducteur du film), doit ainsi aboutir à une réponse (la chute) d’une logique implacable pour le spectateur.
Le scénariste, l’écrivain, ou le conteur, doivent amener le plat final sous une cloche, et le dévoiler à la dernière seconde.
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